Il y a quelques semaines, j’ai eu la chance de pouvoir m’envoler pour Taïwan, et plus particulièrement pour le Taipei Cycle show. Peut-être moins connu du grand public que son pendant germanique, l’Eurobike, ce salon asiatique est pourtant l’un des plus importants de l’industrie. Au milieu des stands de fabricants de cadres et autres compagnies de tradings j’ai essayé de vous dénicher toutes les perles et nouveautés que le salon cachait.

Les vélos du salon

Une des nettes tendances du salon était, comme pour l’ensemble de l’industrie du VTT, à l’e-bike. Au delà des fabricant de moteurs et batteries, la plupart des stands qui présentaient des VTT (bien peu représentés par rapport aux vélos de route et gravel) avaient fait le choix de présenter leurs modèles motorisés.

Kellys bike


La marque slovaque Kellys, qui nous a habitué à des design plutôt audacieux n’a pas fait exception à cette édition du TCS (Taipei Cycle Show) en présentant leur nouvelle plateforme Theos. Sa grande particularité est le placement asymétrique de l’amortisseur qui accompagne une cinématique à point de pivot virtuel. La gamme « F », motorisée en Shimano EP801, se place sur le segment enduro en développant 180/170mm de débattement, tandis que la gamme « R » occupe le segment Alll-Mountain avec un débattement 150/130mm et un moteur Panasonic GX Ultimate. Tous les modèles sont proposés en montage mulet.
Pour les plus curieux d’entre vous, vous pouvez consulter le site Kellys pour avoir de plus amples informations.

Kellys bike

J’ai malgré tout croisé quelques jolis spécimens non électrifiés, notamment un Commençal Tempo avec une déco full gold au stand TRP et un joli Intense Tracer 279 que l’on appercoit très rarement en France.

L’autre grande tendance du salon était au gravel. Et même s’il ne s’agit pas de notre cible habituelle, vous pourriez bien en voir sur notre chaine Youtube très prochainement. Pour l’occasion, je vous présente le dernier né de chez Goblin Bikes. Pour l’anecdote, le vélo était caché à l’arrière d’un stand sans réel rapport et c’est la rencontre fortuite avec son concepteur qui m’a permis de m’en approcher. JC est un français expatrié depuis quelques années à Taïwan et il s’est lancé dans la création et fabrication de vélo. A coté d’un hardtail acier plutôt typé XC, on trouve ce GB02, un groadvel. Outre la fabrication en acier, somme toute assez courante, la particularité de ce vélo réside dans sa grande adaptabilité. Grace à un système de patte à deux positions et de deux options de fourches, il est possible d’orienter le montage vers 3 pratiques différentes: route, gravel et l’all-road pour l’entre deux.

Il y avait beaucoup à voir coté freinage sur ce salon. En premier lieu Clarks présentait sa nouveauté, le React 4, un frein 4 pistons (16/12mm) ultra-abordable. A ses cotés, la marque présentait aussi le porte-étendard de sa nouvelle gamme Racing-Series: le C4. Ce modèle, lui aussi en 4 pistons (tous en 16mm de diamètre) bien qu’entièrement usiné devrait être disponible aux alentours de 200€ la paire avec disques flottants !

Clarks freins
Clarks Freins

Dans la course au pistons, JuinTech proposait son GT6, un étrier hydraulique à 6 pistons pour convertir et apporter puissance et contrôle à n’importe quel système de frein à câble. Bien que principalement destiné au monde de la route et du gravel, on pourrait facilement imaginer ce genre de montage sur un VTT de slopestyle équipé d’un gyro…

Juin Freins
Juin Freins

Pour terminer ce tour d’horizon des nouveautés, RiderEver avait envahit le stand Jagwire et présentait sa nouvelle gamme Attack. En particulier les Attack-XR aux étriers joliment usinés pour améliorer le refroidissement.

Freins Attack XR

Le Taipei Cycle show est aussi le salon de toutes les découvertes, comme ces disques et plaquettes ventilés à l’usinage digne des plus belles dentelles de la régence ou de ces gaines hydrauliques en billes d’aluminium. Si le système a fait ses preuves (selon la conception) pour les transmissions et freinage à câble, le concept me laisse légèrement dubitatif pour un freinage hydraulique et je ne parle pas du modèle de présentation…

Étonnamment, le clou du salon (en tous cas pour moi) nous vient directement du Portugal. Certains d’entre vous connaissent peut-être NDTuned pour ses amortisseurs parmi les plus légers du marché, son concept OVR de cartouche de XC à air ou encore plus récemment pour proposer aux ateliers des pivots et plongeurs de rechange afin de réparer les fourches des poids lourd du marché.

NDTuned
NDTuned

La petite marque avait en présentation toute une gamme de suspension particulièrement intéressante. Le premier point marquant est l’absence de réglage à l’exception du rebond et de la pression/précontrainte. La raison est simple, Nuno Duarte le concepteur défend l’idée qu’il vaut mieux ajuster les suspensions au pilote, plutôt que de le laisser jouer avec des réglages externes nettement moins efficaces. Il n’exclut tout de même pas de proposer par la suite un kit d’ajustement des compressions pour les pilotes les plus pointus qui voudraient pouvoir ajuster le comportement de la fourche à la piste ou aux conditions.
Cette simplification permet de proposer du matos particulièrement léger, en se passant par exemple de bonbonne sur les amortisseurs (qui gagnent ainsi grandement en compatibilité avec la majorité des cadres). Les amortisseurs nus sortent à moins de 295gr et restent sous la barre des 650gr (avec le ressort 400lbs proposé).

NDTuned
NDTuned

Mieux encore, la fourche d’enduro en 38mm, totalement compatible e-bike et disponible en débattement allant de 150 à 180mm sortira aux alentours de 2150gr et la fourche de trail/XC en 34mm pour 120mm de débattement pèsera seulement 1350gr. En jouant sur certaines options (principalement le pivot) il serait possible de gagner encore du poids, mais en perdant aussi en polyvalence.
Cette performance sur la balance s’explique aussi pour les fourches par la conception d’une cartouche unique « ressort/amortisseur ». Traditionnellement chaque coté de la fourche accueille séparément le ressort (air ou hélicoïdal) et la cartouche hydraulique. L’exception étant la lefty de canondale qui, mono-bras oblige, casait les deux dans le même tube. Ici la marque portugaise propose un concept similaire pour améliorer le travail des deux blocs et limiter au maximum les frictions. Ainsi le coté gauche des fourches est simplement vide, à l’exception d’huile de lubrification. Sur le modèle d’enduro que nous avons plus détaillé ensemble, Nuno a même réussi à insérer un ressort à triple chambre (négative et deux positives, comme chez Ohlins ou EXT).

Fourche

Pour finir sur ces prototypes, les fourches sont équipées de paliers glissants. En clair au lieu d’avoir deux paliers dans les fourreaux, le premier est classiquement fixé en haut du fourreau alors que le suivant est fixé sur le bas du plongeur. De cette façon, plus la fourche s’enfonce et plus la distance entre les paliers augmente, améliorant la rigidité et la fluidité. En clair plus la fourche tape et mieux elle travaille.
Mais cette solution oblige à avoir une finition à l’intérieur des fourreaux au même niveau que celle des plongeurs. Impossible dans ces conditions de passer par un ensemble mono-pièce moulé. Les fourreaux sont donc usinés et traités avant d’être collés à une paire de pattes usinées et une arche en carbone. Nuno m’annonçait qu’au final cette solution leur permet un meilleur contrôle des tolérances avant l’assemblage final et donc une meilleure performance.
Toute la gamme, actuellement à l’état de prototype roulant, devrait être disponible à la commande pour l’Eurobike, uniquement en combo fourche/amortisseur dans un premier temps.

Après cette démonstration technique, la concurrence faisait pâle figure… Si la qualité semblait faire défaut, la quantité elle n’était pas en reste, le salon étant truffé de fabricants et vendeurs de fourches, à priori plutôt orientées entrée de gamme et OEM. La tendance est aussi très fortement orientée vers les fourches inversées.

Fourche inversée
Fourche inversée DNM

Du coté de chez DNM, j’ai tout de même repéré leur amortisseur haut de gamme, le RCP2Plus qui offre de nombreux réglages mais n’est proposé qu’en taille le réservant aux gros vélos de freeride ou aux motos électriques légères.

Amortisseur DNM RCP2+


Chez KS ce prototype de fourche inversée semble particulièrement intéressant, en revanche aucune info de disponible, si ce n’est qu’elle était montée sur des vélos d’enduro. Affaire à suivre…

Taïwan est la contrée d’origine de la tige de selle télescopique, puisque le premier modèle de l’histoire a été produit ici par KS (mais je vous réserve un article qui lui est spécialement dédié). Après la Vyron, la Reverb AXS et la LEV Circuit, le marché semble être au sans fil. Si X-Fusion ne présentait qu’un prototype, encore assez loin de la commercialisation, la petite marque italienne Switch présentait un modèle parfaitement fonctionnel et très intéressant.

Tige de selle Switch sans fil

Coté pneumatiques, je n’ai pas trouvé grand chose à me mettre sous la dent, si ce n’est la découverte d’Innova, un fabricant avec une paire de pneus VTT à son catalogue dont ce joli Javelin. Retour chez les italiens de Switch avec leur gamme de mousses anti-pincements, disponibles en trois versions selon la pratique.

Pneus dirt Goodyear
Pneus dirt Goodyear

Chez Goodyear la nouvelle gamme Wingfoot destinée au dirt et à la pumptrack (parfait pour suivre les conseils de Max) était de sortie. Uniquement disponible en 26*2.25gr, ces pneus partagent un poids plume de 550gr mais proposent des dessins différenciés. Le dirt est légèrement cramponné, tandis que le park, nettement plus roulant est presque lisse. L’arrière du stand réservait quelques surprises, mais chut il va falloir attendre encore un peu…

Pneus dirt Goodyear


Pour finir, petit aperçu des capacités de production et d’innovation de l’île: des rayons en carbone, titane et même plaqués or chez CNSpoke d’un coté et des écrous titane, plutôt novateurs dans le design de l’empreinte mais malheureusement non trouvable sur le marché.

Rayons CNSpoke
Transmission TRP

Pas de grande nouveauté du coté des transmissions. Il faut dire que le marché se répartit majoritairement entre Sram et Shimano qui n’attendent pas les salons pour présenter leurs nouveautés. TRP avait tout de même leur groupe haut de gamme EVO12 au complet en présentation et surtout une intéressante collaboration avec Pinion sur une paire de leviers de freins route ou gravel compatibles avec la célèbre boite de vitesse. Après quelques recherches, la marque propose désormais un kit de commande électrique qui permet de se passer des anciennes commandes tournantes à deux câbles. De toute évidence un bon pas pour améliorer l’accès à la boite de vitesse.

Boite de vitesse Pinion
TRP

Si les deux géants règnent sans partage, on voit de plus en plus de concurrence sérieuse. C’est le cas de LT Twoo qui propose des groupes à prix doux mais dont la finition est loin d’être ridicule. A l’opposé chez Recon, spécialiste des cassettes mono-bloc, les prix sont inversement proportionnels au poids (particulièrement bas). Comme un bon dessert, impossible de résister à un petit éclaté, ici d’un boitier de pédalier DUB chez Token.

Transmission LT Twoo
Cassette Recon
Boitier de pédalier DUB Token

C’est terminé pour cette première partie, pour finir je vous laisse avec la légende Gary Fisher, croisé au hasard des stands. Si vous avez quelques instants à lui consacrer, je suis sûr qu’il aura foule d’anecdotes à vous conter…

Gary Fisher
Rémi Poulain
Je suis le mécano fetichiste d'outillage de la team. Baroudeur dans l'âme, quand je ne suis pas derrière mon guidon à l'aventure sur les plus beaux trails, vous risquez de me trouver à l'atelier, une clé à la main et une petite mousse jamais loin.